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A Caroline Otero 

Mon âme tremblante et seule
Souffre à la tombée du soir
On danse par là; allons voir
La danseuse espagnole.
 
Ils ont bien fait d’enlever
L’immense drapeau de la façade;
Parce qu’avec ce drapeau-là,
Moi, je ne saurais entrer
 
Voici qu’arrive la ballerine :
Orgueilleuse et pâle, elle est là :
Galicienne, cette femme que voilà ?
Non ! Tout simplement divine !
 
Elle porte montera de torero
Et une cape chamarrée
C’est comme une giroflée
Qui se couvrirait d’un chapeau !
 
On entrevoit son sourcil
Sourcil d’Arabe, traîtresse :
Et son regard de Mauresque :
Et sa blanche petite oreille.
 
C’est le prélude, lumière douce,
Ceinte dans son corsage et son châle,
C’est la Vierge de l’Assomption
Qui danse sur un air andalou.
 
Elle bat de ses talons
Le parquet d’une caresse enjôleuse,
Comme si chaque planche faisait
Un parquet d’âmes amoureuses.
 
Et l’invite va croissant
Dans la flamme de ses yeux,
Et le châle frangé de feu
Va, dans l’air, se balançant.
 
Tout à coup, d’un bond en avant
Elle s’enfuit, se plie, se retourne :
Elle ouvre en deux sa cape lourde,
Et montre son corsage blanc.
 
Le corps cède, ondoyant ;
La bouche ouverte provoque ;
Et sa bouche est une rose :
Elle bat des talons, lentement.
 
Elle ramasse d’un geste fragile,
Le châle aux franges de feu :
Elle s’en va, fermant les yeux,
Elle s’en va, comme dans un soupir…
 
Elle danse très bien cette Espagnole
Dans son châle rouge et blanc :
Retourne, sombre, à ton néant
Mon âme tremblante et seule.
 
 
 

José Marti

 
 
Dance Poetry
A comprehensive anthology
Edited by Alkis Raftis
Copyright 2012

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