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Danses
Nos faibles joies n’aiment plus les rondes violentes
Qui s’échevelaient au rire énorme de Silène ;
Il nous faut, aujourd’hui, des mélodies lointaines,
Des gestes de fatigue extrême et des couleurs dolentes.
Il nous faut des accords monotones comme nos heures,
Il nous faut les yeux léthargiques des danseuses
Qui, rêvant de leur vieille et douce Asie-Mineure,
Agonisent en des luxures paresseuses.
Cette musique est la pauvreté de nos âmes,
De nos âmes qui ne savent plus chanter qu’un seul air,
Et cette danse, où s’exaspère une stérilité de spasmes,
N’est-elle pas la lassitude de notre chair ?
Sauvagerie alanguie des femmes sur qui l’ombre
Des arbres calmes de là-bas repose encore,
Cliquetis de bijoux nocturnes, aromes sombres,
Tressaillements moitié d’amour, moitié de mort !
Ah ! c’est cela qu’il faut aux mourants que nous sommes !
Des mouvements comme un regret de volupté,
Des rires comme des souvenirs de gaieté,
Des rythmes comme une fatigue de chanter...
O.V. de L. Milosz