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La danse
Dans la profondeur de Java, voici, parmi les ombres
du territoire, le palais illuminé.
Je passe entre des archers verts, scellés
aux murs et j’entre
dans la salle du trône où se tient le monarque,
dans la salle du trône où se tient le monarque,
un porc apoplectique, un paon impur
encordonné, tout constellé.
A ses côtés il a deux Hollandais, ses maîtres,
marchands veillant sourcils froncés.
Ô répugnant groupe d’insectes ! Et comme ils jettent
consciencieusement sur les êtres
des pelletées de vilenie.
Factionnaires sordides
des terres lointaines, et monarque
pareil à un sac bien clos se traînant
avec sa chair fleurie, ses étoiles postiches
sur une humble patrie d’orfèvres.
Tout à coup,
du fond le plus éloigné du palais, dix ballerines
sont entrées, lentes comme un rêve
sous les eaux.
Chaque pied s’approchait
de biais, le miel nocturne s’avançait
comme un poisson d’or. Et l’ocre des masques
portait, sur l’épaisseur huilée des chevelures,
une fraîche couronne de fleurs d’oranger.
Elles sont venues se placer
face au satrape, elles apportaient la musique, une rumeur
d’élytres de cristal. La danse pure
était une fleur qui poussait, et les mains claires
modelaient une statue fugitive,
modelaient une statue fugitive,
et un paquet de mer ou de blancheur
battait la tunique aux talons,
et dans chaque mouvement de colombe,
oiseau de métal sacré, susurrait
le vent de l’archipel, l’air embrasé
comme un arbre nuptial à l’heure du printemps.
Pablo Neruda